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Le premier atterrissage d'un engin américain sur la Lune depuis plus de 50 ans devra probablement encore attendre: un alunisseur privé a rencontré une "anomalie" peu après son décollage lundi, et perd désormais du carburant en vol, a déclaré l'entreprise Astrobotic l'ayant développé.
L'alunisseur a décollé avant l'aube lundi depuis la Floride, à bord de la nouvelle fusée Vulcan Centaur du groupe ULA, qui regroupe Boeing et Lockheed Martin.
L'appareil, nommé Peregrine, a été mis sous tension peu après sa séparation d'avec la fusée, et la communication a pu être établie avec succès.
Mais "malheureusement, une anomalie est survenue", a expliqué Astrobotic dans une déclaration sur X. Celle-ci a empêché l'entreprise de réorienter l'appareil vers le Soleil, afin qu'il puisse recharger ses batteries grâce à ses panneaux solaires.
La compagnie a ensuite expliqué que le problème résultait "probablement" d'un souci au niveau du système de propulsion.
"Si c'est le cas", cela "met en péril la capacité du vaisseau à atterrir sur la Lune", a dit l'entreprise.
Une "manoeuvre improvisée" a été réalisée pour réorienter les panneaux solaires vers le Soleil, permettant aux batteries de recommencer à se charger.
"Les équipes travaillent pour stabiliser cette perte, mais compte tenu de la situation, nous avons donné la priorité à la maximisation" des données scientifiques pouvant être récoltées, a déclaré la compagnie. "Nous sommes actuellement en train d'évaluer quels profils de mission alternatifs seraient possibles à l'heure actuelle."
Peregrine a été développé par Astrobotic avec le soutien de la Nasa, qui a chargé cette entreprise de transporter jusqu'à la Lune du matériel scientifique - un contrat de 108 millions de dollars.
"Chaque mission est une opportunité d'apprendre", a réagi la Nasa sur X.
Astrobotic espérait devenir la première entreprise à réussir à se poser sur la Lune. La tentative d'alunissage était prévue le 23 février.
Ces dernières années, des compagnies israélienne et japonaise ont aussi tenté d'alunir, mais ces missions se sont soldées par des crashs.
"Mener le retour de l'Amérique sur la surface de la Lune, pour la première fois depuis Apollo, est un immense honneur", avait déclaré lors d'une conférence de presse vendredi le patron d'Astrobotic, John Thornton. Il s'était toutefois dit conscient des risques d'échec.
- Cendres humaines -
Le lieu d'atterrissage visé pour l'engin était situé sur la face visible de la Lune, près de mystérieux dômes formés par de la lave mais que les scientifiques peinent à expliquer.
Grâce aux instruments expédiés, la Nasa devait y étudier la composition de la surface, ainsi que les radiations.
Etudier l'environnement lunaire doit notamment permettre de préparer le retour d'astronautes sur la Lune, que la Nasa prévoit avec son programme Artémis.
Mais la Nasa n'est pas le seul client à bord, et la mission a également provoqué la controverse: parmi les cargaisons de clients privés transportées se trouvent les cendres ou l'ADN de dizaines de personnes, dont celles du créateur de la célèbre série télévisée de science-fiction Star Trek, Gene Roddenberry. Un partenariat avec l'entreprise Celestis, spécialisée dans les "vols spatiaux commémoratifs".
L'envoi de ces cendres sur la Lune a suscité la colère de la tribu amérindienne Navajo, qui a fustigé la "profanation d'un lieu sacré" pour "beaucoup de cultures amérindiennes", sans toutefois obtenir le report du lancement.
- Economie lunaire -
Le lancement inaugurait une série de missions soutenues par l'agence spatiale américaine, désireuse d'encourager le développement d'une véritable économie lunaire.
Un échec de la mission ne manquera pas de soulever des questions sur cette nouvelle stratégie de la Nasa, qui souhaite se reposer en partie sur le secteur privé pour ses ambitions lunaires.
Elle a ainsi passé contrat avec plusieurs entreprises, dont Astrobotic, pour l'envoi de matériel scientifique sur la Lune. Le programme, baptisé CLPS, fournit aux compagnies un financement crucial.
Une autre entreprise sélectionnée, Intuitive Machines, doit également décoller pour la Lune mi-février avec une fusée de SpaceX.
Ceci doit permettre à la Nasa "de faire le voyage plus souvent, plus rapidement et pour moins cher", avait expliqué Joel Kearns, haut responsable au sein de l'agence spatiale.
"Le succès de toutes les tentatives n'est pas assuré", avait-il reconnu. "Ce que nous avons demandé à l'industrie est très difficile à faire."
A ce jour, seuls les Etats-Unis, l'Union soviétique, la Chine et l'Inde ont réussi à faire atterrir un appareil sur la Lune.
Une mission de l'agence spatiale japonaise (Jaxa) doit également tenter d'alunir dans environ deux semaines. La Russie a pour sa part spectaculairement raté un alunissage cet été.
(T.Burkhard--BBZ)