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A côté des livres anciens, films, documents sonores... se trouvent juke-box, Game Boy ou Magnavox Odyssey des Etats-Unis: avec environ 20.000 objets vidéoludiques conservés, la Bibliothèque nationale de France, à Paris, possède l'une des plus grandes collections du genre, un "patrimoine culturel à part entière" qu'elle préserve avec soin.
Pour accéder aux trésors vidéoludiques de la Bibliothèque nationale de la République française, il faut se rendre dans l'une des quatre tours de 79 mètres de haut, et 22 étages chacune, de la bibliothèque François-Mitterrand (du nom de l'ancien président de la République, 1981-1995), dans le sud-ouest de Paris. Avec l'escorte impérative d'un conservateur pour franchir les différents contrôles de sécurité.
Au milieu des gramophones et juke-box de la réserve Charles Cros (poète et inventeur français du XIXe siècle), deux vitrines abritent une dizaine de consoles emblématiques de l'histoire du jeu vidéo, à l'image de la célèbre Game Boy de Nintendo, l'Atari Lynx, la Sega Saturne et surtout la très rare Magnavox Odyssey, commercialisée en 1972 aux Etats-Unis.
"On conserve ces consoles pour donner aux futurs chercheurs, dans des dizaines voire des centaines d'années, à comprendre comment on pouvait jouer à ces jeux vidéo, quel était le matériel utilisé", explique à l'AFP Laurent Duplouy, chef du service multimédias au département dédié de la Bibliothèque nationale de France (BNF).
"Pour la BnF, le jeu vidéo est aussi précieux que les autres types de documents conservés. On y porte la même attention, c'est un patrimoine culturel à part entière", ajoute-t-il.
Mission encore assez confidentielle de la BnF, la collection et préservation du patrimoine vidéoludique s'expliquent par la loi sur le "dépôt légal" des documents multimédias, datant de 1992.
Si le texte ne mentionne pas directement les jeux vidéo, il a fait entrer dans ce dispositif de conservation les logiciels interactifs, et donc, par extension, les productions vidéoludiques. Chaque titre ou version de jeu doit être ainsi déposé à la BnF en deux exemplaires: l'un pour la conservation et l'autre pour la consultation.
Avec une équipe de 20 personnes dédiées à cette mission, des chargés de collection, des magasiniers et aussi des ingénieurs, la BnF parvient à récolter 2.000 documents de ce type chaque année.
- Dématérialisation -
Après les consoles, direction quelques étages plus bas pour découvrir les milliers de jeux entreposés dans les galeries de conservation, plongées dans le noir à température constante de 19 degrés, et protégées de l'humidité.
Reconditionné dans des boîtes neutres, chaque jeu dispose de sa cote pour être indexé dans le catalogue général de la bibliothèque.
D'Adibou, le célèbre jeu éducatif, au premier opus de Tomb Raider, qui a fait connaître le personnage de Lara Croft dans le monde entier, en passant par les derniers épisodes du jeu d'aventure Assassin's Creed, tous les genres sont représentés sur tous les supports possibles (cartouches, disquettes, CD-ROM,...).
Mais comment conserver éternellement ces jeux alors que les supports physiques se dégradent au fil du temps et que l'obsolescence technologique les menace ?
Grâce à la numérisation des jeux analogiques et les "émulateurs", ces logiciels développés par des communautés de passionnés qui permettent de jouer à des jeux anciens sur des ordinateurs récents, explique Laurent Duplouy.
"On a deux ingénieurs au sein du service multimédia qui font de la veille en permanence sur ces questions-là pour trouver les émulateurs, les faire fonctionner et les mettre en adéquation avec nos collections", indique-t-il.
Autre enjeu à venir pour les conservateurs de la BnF: la dématérialisation des jeux ("cloud gaming") qui s'impose de plus en plus comme le modèle vidéoludique dominant, à l'image du jeu phénomène Fortnite, accessible seulement en ligne sur une plateforme dédiée et via des mises à jour régulières.
"Nous sommes en négociation avec des éditeurs et certaines plateformes pour trouver le moyen d'arriver à récupérer des jeux en dépôt légal sous leur forme dématérialisée", assure le responsable, admettant les limites techniques posées par ce nouveau modèle.
(T.Burkhard--BBZ)